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Portrait | Max et Vincent carburent contre carbone

Maurane Nait Mazi
12 mars 2023
12 mars 2023
8 min


Co-fondateurs de la start-up Nopli, Max et Vincent sont des nouveaux acteurs de la seconde main. Ces entrepreneurs nous expliquent pourquoi et comment ils décident de créer et gérer les onglets "seconde main", "seconde vie" ou encore "deuxième acte" des marques. Avant de mettre en lumière leur démarche personnelle axée sur la réduction des émissions de CO2, découvrez leur vision du marché en pleine croissance. 

Nopli, les marques et la seconde main

start up seconde main : Nopli Max et Vincent
Max et Vincent dans la seconde main à Paris
Max Herrmann et Vincent Ducasse - Paris. CMCM ©


Vincent nous reçoit chez lui à Paris avec Max, son associé. Depuis 6 mois, le salon de Vincent est devenu le lieu de travail de ces anciens collègues devenus partenaires de travail.

« C'est ici que nous avons passé pas mal de temps à la fois pour itérer sur de nouvelles idées et pour construire les briques de Nopli. C'est un peu notre garage à nous. (rires) » Max

Le garage est une référence aux start-up californiennes nées de la bricole de leurs créateurs dans leur propre garage de la Silicon Valley.

« On va sortir de ce mode garage car nous intégrons Station F dans les prochaines semaines. » Max

Après ces premiers mois d’activité ici, c’est dans le plus grand campus européen de start-up que leur aventure entrepreneuriale se poursuit.‍

Âgé de 30 ans et après une école d'ingénieur puis différentes expériences dans la grande distribution et le e-commerce, c’est Nopli qui fait entreprendre Vincent.

Vincent Ducasse de la start up Nopli dans la seconde main
Vincent Ducasse

Max a 27 ans, vit à Paris aussi. Après avoir été diplômé d'une école de commerce, c’est du côté de la data qu’il se range. C’est une précédente expérience professionnelle, chez Cubyn, une start-up de solution e-commerce qui les lie et leur donne envie d’entreprendre.

Max Herrmann de la start-up Nopli dans la seconde main
Max Herrmann
« On a voulu créer Nopli en adéquation avec notre envie d’entreprendre et la volonté d’avoir de l’impact. » Max
« Nopli a été pensé pour être à la fois en adéquation avec nos valeurs et de l’autre en répondant au besoin des marques de se positionner dans la seconde main. » Vincent

L’adoption de la seconde main par les marques

Les marques qui proposent une offre de seconde main en ligne sont de plus en plus nombreuses. Il ne se passe pas une semaine sans qu’une marque ne lance son “espace” seconde main. Aucun secteur n’y échappe. Les plateformes telles que Vinted et LeBonCoin ne sont plus en situation de monopole pour la revente des produits d'occasion, comme c'était encore le cas il y a plusieurs années.

Les marques reprennent le pouvoir. Longtemps frileuses de s’associer à la revente de leurs produits de seconde main notamment pour des questions de désirabilité et de logistique, les plateformes de vente en ligne de mode s’y mettent.

  • Aigle avec Second Souffle
  • The Kooples avec Second Love
  • Petit Bateau avec Changer
  • Atelier Particulier avec Deuxième Acte
  • La Virgule avec Frip
  • Demain Balzac Paris avec Seconde vie

De jeunes acteurs comme Nopli proposent de les accompagner en marque blanche pour construire un portail dédié et un système intégré.

« Antik Batik avec Antik Batik Vintage a été rendue possible grâce à la solution digitale proposée par Nopli. » Max

Max nous a fait une démonstration de la solution de Nopli en marque blanche sur le site de la marque. On pourrait s’y méprendre, offre d’occasion et offre de neuf se ressemblent.

Les marques se démarquent avec une offre de seconde main intégrée




Les marques ont tout intérêt à développer leur propre offre de seconde main pour répondre à une demande croissante de consommateurs d’acheter des produits de seconde main d'abord. S’en priver reviendrait à renoncer à d’importantes parts de marché.

Selon le site américain de friperie en ligne ThredUp, le marché de la seconde main dépasserait celui de la fast fashion d’ici à 2030.

La seconde main est ainsi le moyen de gagner de nouveaux clients et de fidéliser les actuels. A rebours des plateformes Vinted ou Vestiaire collectif, la grande majorité des marques propose aux vendeurs un bon d’achat à dépenser sur leur shop.

Les marques se portent également garantes de la qualité et la traçabilité de leurs produits. Elles assurent ainsi la sécurité du marché de l’occasion. On relève que pour pour beaucoup d’entre elles c’est aussi un outil de communication.

Exit le frein de la désidérabilité des produits, les lourdes contraintes logiques et le coût associé à la mise en place de la solution web. C’est en partie le pari de Nopli.

« Le dispositif peut être coûteux pour la marque. Nopli propose une solution rentable, tout-en-un, personnalisé et rapide. » Max
« Comme internet et la vente en ligne dans les années 2000, l’offre professionnelle de seconde main est en train de devenir aujourd'hui incontournable. » Vincent

Assiste-t-on au début de la digitalisation de la seconde main ? Le marché du retail se réinvente et de nouveaux acteurs naissent en son sein.

Les marques en 2030 seront-elles celles qui produisent le futur de l’occasion en s’assurant à la fois de la commercialisation de ses produits neufs et de ses propres produits déjà en circulation ? Pour eux oui.

Leur démarche personnelle de réduction d’impact carbone

Avoir de l'impact est important pour ce duo d’entrepreneur. Alors que Nopli aide le marché de la seconde main à se structurer, les fondateurs ne se contentent pas de transformer le paysage commercial. Ils s'engagent également dans une démarche personnelle pour réduire leur propre empreinte carbone, illustrant ainsi l'importance d'une responsabilité environnementale à la fois professionnelle et personnelle.

Selon le rapport Faire sa part de Carbone 4, pour respecter l’Accord de Paris, 2 tonnes de CO2eq/an en moyenne par personne sont indiquées.

C’est en se documentant, en parcourant la littérature relative au bilan carbone et à l'empreinte carbone, qu'ils ont décidés de passer à l'action il y 2 ans. "Nos gestes climat" de l’ADEME est par exemple un outil qu’ils ont utilisé pour débuter. Il permet rapidement et facilement en répondant à quelques questions d’avoir une indication sur son empreinte carbone et sur les postes d’émissions associés.

Afin de savoir par où commencer ils utilisent une méthode de calcul : l’empreinte carbone.

L’empreinte carbone est un calcul des émissions de gaz à effet de serre. A l’échelle personnelle, elle permet de se rendre compte de ses principaux postes d’émissions.

Décortiquer par grandes masses ses émissions de gaz à effet de serre

« Cette année, je me fixe une enveloppe d’émissions autour de 5 tonnes. » Max

Comme Max le fait, pour simplifier la notion d’empreinte carbone et de postes d’émissions, on peut faire le parallèle avec un budget financier et parler d’enveloppe.

Dans la même logique qu’une enveloppe budgétaire que l’on alloue où on fixe par exemple un budget à dépenser chaque mois pour faire ses courses, ici on fixe un budget carbone à respecter chaque mois. Tout en gardant en tête qu’on est dans une logique globale de réduction de ses émissions. On veut plus réduire que remplir.

« Ma marge de progression se trouve autour de 3 tonnes. Les gens les plus performants aujourd’hui se situent autour de 3 tonnes. La moyenne des français est autour de 10. »
« Chaque année, mon empreinte est amenée à décroître. Cette enveloppe, pour la simplifier, je l’ai divisée en deux catégories majeures : les déplacements et l’alimentation. » Max
« En ce qui concerne l’avion, je me suis fixé de passer moins de 10h dans un avion sur l’année. » Max
« J’ai la chance d’avoir beaucoup voyagé. Pour le travail mais pas seulement. J’ai évolué dans ma vision du voyage en avion. Je voyage désormais moins et autrement, notamment en train. » Vincent
« En ce qui concerne l’alimentation, je comptabilise à chaque repas si j’ai mangé végétarien, de la viande, du poisson ou une catégorie à part du bœuf. » Max

Après chaque repas, Max prend quelques secondes pour renseigner son compteur, une application destinée à tous les usages. En fin de mois, il le reporte sur un tableau général comprenant les autres postes d’émissions.

« Pour le poste alimentation, il faut saisir les méthodes de production, les lieux de production et les saisons. Si on prend l’exemple de l’avocat, le repas est végétarien. Cependant, il est produit à l’autre bout du monde, ce qui a un impact carbone élevé sans parler de l’impact sur la ressource en eau et la déforestation engendrée. Idem manger des courgettes et des aubergines en hiver, cela n’a pas de sens. » Max


La consommation de seconde main dans tout ça. Objets et vêtements, ça compte ?

Évidemment oui et au-delà de la seule empreinte carbone, la fabrication, le transport et la fin de vie de ce que nous consommons a aussi des impacts sur la biodiversité, l'eau, l'air et le sol ainsi que des impacts sociaux.

Si on se place dans le cadre de l'empreinte carbone en France, alors nos déplacements et notre alimentation ont une plus grande part.

Les postes d’émissions sont généralement répartis en 5 catégories :
  1. Les déplacements
    (2650 kg CO2 eq par personne)
  2. L'alimentation
    (2350 kg de CO2 eq par personne)
  3. Le logement
    (1900 kg de CO2 eq par personne)
  4. L'achat de biens et de services
    (1600 kg de CO2 eq par personne)
  5. La dépense publique
    (1400 kg de CO2 eq par personne)

La répartition par catégorie permet d'avoir une vision des différents ordres de grandeur composant l'empreinte carbone moyenne en France en 2019.

Si on se concentre sur les achats pouvant se substituer en très grande partie par de la seconde main alors on arrive à 1440 kg soit 1,4 tonnes de CO2 eq par personne.

Max et Vincent priorisent l’alimentation et le transport parce que leur consommation de matériels et notamment de vêtements est résiduelle.

« Je tourne avec un vestiaire de 10 jours. J’ai très peu de choses. Pas à la mode. En objet, on a toujours acheté le gros matériel sportif d’occasion. » Max


Rendre simple la visualisation de ses émissions pour soi et pour les autres

Compter ses émissions, partager ses objectifs et réussites ne paraît pas difficile pour Max et Vincent. On aurait presque envie de tout calculer avec eux !

« On a notre démarche personnelle, nos objectifs chaque année. Notre objectif est de baisser notre enveloppe mais aussi d’en parler simplement aux gens qui sont intéressés ou n’arrivent pas à s’intéresser parce que c’est trop compliqué. » Max
« C’est facile pour moi car j’ai extrêmement simplifié ce calcul d’émissions et cela m’aide à le tenir. » Max

Pour eux, rien d’insurmontable. Les premiers pas sont mêmes sympas.

« Les premiers pas sont en général assez simples car on a souvent des gros postes. L’avion plusieurs fois par an par exemple. On peut réduire ! » Vincent
« Nous avons la chance d’avoir des postes de dépenses non contraints et des leviers relativement faciles à actionner. Parce qu’on vit à Paris. Parce qu’on a la chance aussi d’avoir le revenu de faire ces choix là. » Vincent

La recommandation CMCM pour se lancer dans le calcul de son empreinte carbone

  • Comprendre : se documenter comme Max et Vincent pour bien faire et connaître les ordres de grandeur.
  • Mesurer : mesurer son empreinte carbone et se la représenter dans différentes catégories d’émission.
  • Compartimenter : se fixer un ou des objectifs simples par secteur. Il y a des actions plus efficaces que d’autres pour réduire son empreinte carbone, il est important de comprendre les ordres de grandeurs associés. Si vous achetez 10 vêtements neufs par mois, c’est peut être par là qu’il faudra commencer.
  • Faire : passer à l’action et tester. On a tous débuté !

L’action personnelle et leur approche non-dogmatique

« On le fait avec des données. Ce n’est pas dogmatique. » Max

Bien que familier des chiffres, ils sont convaincus que c’est accessible.

« Je ne me sens pas un activiste. Juste un relai de ce que j’en ai compris. La façon dont j’aborde le sujet avec mes parents, mes grands-parents c’est juste d’expliquer qu’il y a des ordres de grandeurs et que tout ne se vaut pas. Quels sont les ordres de grandeur faciles à aborder pour chacun ? Ensuite, j’explique comment moi je fonctionne et quels objectifs je me fixe chaque année. » Max
« On essaie d’avoir un discours positif. Si vous parlez à votre grande tante ou vos grands-parents, il faut simplifier le sujet. Est-ce que vous avez besoin de deux voitures alors que vous êtes un couple ? Vous pouvez réduire votre consommation de bœuf, vos trajets en avion. Cela sera très bien. » Max

Le CMCM de ces entrepreneurs

Le “moins” de “consomme moins” de Vincent se traduit par la réduction annuelle de son enveloppe d'émissions.

Celui de Max se divise en deux aspects. Pour les biens, c’est le moyen d’atteindre la réduction de ses émissions. Pour les services, aller au théâtre par exemple, il n’a pas vocation à réduire, au contraire selon lui.

« Je ne suis pas très à l’aise avec l’idée de décroissance. Pour moi, on peut déverser une consommation de produits en service. » Max
Consomme Moins

Leur “mieux” repose sur la consommation de produits respectant les droits humains, une consommation plus juste et accessible.

« Comment permettre à des gens qui consomment de la fast fashion pour des raisons économiques d’avoir accès à des produits durables, de qualité et à des prix accessibles ? Avec la seconde main. » Vincent
Consomme mieux

En résumé, leur "moins" repose davantage sur des aspects écologiques et leur "mieux" sur des aspects sociétaux.

Maurane Nait Mazi et William Nait Mazi

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